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sous le signe du cancer
11 novembre 2016

Les remèdes pour le cancer

A la station Luxembourg

Dans le RER B que je prenais à la station de la gare du Nord, j'attendais avec impatience l'arrêt Luxembourg. Dès les portes ouvertes, je sortais sur les quais pour me diriger vers les escalators et là, en surface, j'étais face au jardin du Luxembourg. Dans la lumière d'été, le jardin m'apportait dépaysement et quiétude, une parenthèse enchantée dans la vie trépidante, assourdissante des rues du quartier. Là, le souvenir du passé se manifestait plus qu'ailleurs. D'abord, les statues des reines de France, le Sénat et encore les réminiscences des lectures où le jardin du Luxembourg sert de cadre indispensable à l'histoire, comme par exemple, le lieu de la rencontre de Marius et de Cosette dans Les Misérables. Mais, derrière les échos littéraires ressurgissaient ma propre enfance, mon jardin mystérieux qui offrait tant de rêves à réaliser à mes jeux d'enfant. La maison était modeste sans confort mais le jardin, c'était l'aventure à portée de main. Dans cette chasse au bonheur, je goûtais les instants de liberté, de découverte. Ici, des animaux à observer, là des fleurs à contempler.
Ce jardin du Luxembourg me redonnait de la force dans les épreuves quI m'attendaient. J'échappait au réel par la pensée. J'imagi nais la vie de ces passants, de ces promeneurs, de ces oisifs sur les fauteuils verts disposés au gré de leur fantaisie. La vie calme et tranquille me permettait de reculer le plus possible le moment de partir. Dans ce jardin, éden minuscule, je venais puiser le courage de me battre contre ce crabe qui me dévorait insidieusement, subrepticement et chaque fois plus intensément. Je savais qu'ensuite il fallait prendre le bus 24 pour aller à l'institut Curie et être une malade parmi d'autres avec ma perruque, dans un de ces fauteuils alignés pour la chimiothérapie. Et dans la salle d'attente, la peur, la peur atroce de mourir bientôt, le sentiment que cette fois la lutte serait vaine. Combien me restait il à vivre ? quelques années ? quelques mois ? Il fallait supporter cette fatigue, ces malaises, cet essoufflement constant, signes avant coureurs d'une fin prochaine. L'envie de savoir mais aussi d'ignorer. Ne pas savoir, attendre, passer du désespoir â la confiance en la science mais aussi dans cet amour de la vie ancré au plus profond de moi.
Mais avant de repartir par le RER B, pour aller dans mon appartement où les murs m'enserraient me privant de liberté et de lumière, je m'arrêtais encore une fois dans ce jardin du Luxembourg, où je puisais inlassablement des instants de beauté et de plénitude. Parfait microcosme de ce Paris dont le nom signifie "paradis" en ajoutant deux lettres, ce jardin devenait plus qu'un lieu, une personne amicale et complice. Assise sur un banc, j'écoutais les oiseaux qui me chantaient l'espoir, je contemplais les massifs de fleurs qui m'enseignaient que la beauté de la nature comme celle de Paris rendent la vie infiniment belle, que la guérison était en cours. J'aurais voulu arrêter le temps, saisir à deux mains ces instants magiques où je sentais la vie, la vie pleine et profonde qui me donnait foi en l'avenir en dissolvant le spectre de la mort.
Inlassablement je recousais ces moments heureux sur l'étoffe de mes journées pour combattre la tristesse et les doutes du présent.
En rémission, maintenant, je m'arrête à la station Luxembourg, devant le jardin du Luxembourg, le coeur rempli de reconnaissance pour ce Paris qui, plus que la médecine, guérit les maux du corps et de l'esprit.

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